Tribune – Alors que la droite se veut prudente à propos d’une intervention en Syrie, Paul Godefrood, jeune militant UMP, défend la position de François Hollande pour intervenir rapidement.

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Le président syrien Bachar el-Assad a mis en garde hier contre le risque d’une « guerre régionale » en cas d’action militaire occidentale(Photo:Sergei Supinsky/Licence CC)

Il y a deux ans, le monde arabe était secoué par les révolutions démocratiques. Des régimes, institués pour la plupart d’entre eux au sortir de la période coloniale, allaient enfin être balayés par le souffle des aspirations démocratiques des peuples, c’était écrit. On s’était alors pris à rêver d’un monde arabo-musulman réconcilié avec les concepts de démocratie et de liberté, débarrassé de ses composantes autoritaristes. La Tunisie, l’Égypte, la Libye; des remous au Maroc, aux Émirats arabes unis… puis enfin la Syrie. Entre-temps, les premières élections libres plaçaient à la tête de ces États le parti Ennahda et les Frères musulmans. Qotb tenait enfin sa revanche sur Nasser.

On s’est ensuite rappelé que le Proche et Moyen-Orient n’étaient pas l’Europe, pétrie des valeurs libertaires et égalitaires ; on s’est souvenu que la religion était constitutive de ces sociétés civiles, que les « barbus », pourchassés par les régimes autoritaires – longtemps appuyés par nos démocraties occidentales – constituaient aujourd’hui une alternative crédible et légitime, par leur implication auprès des plus pauvres, des déshérités, par leur lutte contre les généraux. Alors on a brandi le spectre de l’islamisme d’État, du terrorisme en devenir pour diaboliser ces gouvernements démocratiquement élus. On a même consenti au coup d’État en Égypte, rappelant étrangement celui d’un jeune général il y a 60 ans. Plutôt Al Sissi que Morsi aurait-on pu entendre.

Bachar el-Assad, digne héritier de son père

Pendant ce temps, en Syrie, aux opérations de « maintien de l’ordre » succédaient des opérations militaires « contre le terrorisme ». La guerre civile débutait et Bachar el-Assad pouvait enfin devenir le digne hériter de son père Hafez el-Assad. Le surpasser même : en comparaison des 100 000 morts, les 30 000 victimes du massacre de Hama pourraient presque passer pour de l’amateurisme (le massacre de Hama résulte de la répression, par le pouvoir syrien d’Hafez el-Assad, de la rébellion fomentée par les Frères musulmans dans la ville de Hama en février 1982). Bien sûr, les démocraties occidentales ont haussé le ton, elles ont condamné, elles ont même saisi le conseil de sécurité de l’ONU. En vain. Et puis peu à peu, enhardies par leurs succès en Tunisie et surtout en Egypte, les islamistes ont rejoint la lutte contre Bachar el-Assad, prenant de plus en plus de poids dans les combats.

Alors dans les chancelleries, on s’est interrogé : est-il bien pertinent d’aider les rebelles à renverser Al-Assad pour se retrouver avec une Syrie islamiste ? Est-ce pertinent de favoriser l’émergence d’un axe religieux allant de Tripoli à Damas ? Comment se positionner dans ce conflit où l’Iran veut élargir son influence, où la sécurité d’Israël est compromise, où le monde que l’on connaissait dans cette région est prêt de tomber ? N’ayant pas de réponse, les grandes capitales ont laissé couler, jouant la montre et espérant que l’un des deux l’emporte avant que la situation n’exige une intervention.

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Photo: Pablo Martinez Monsivais/Licence CC

Malheureusement, cette situation est arrivée trop tôt. Le 21 aout, le régime syrien a franchi la fameuse ligne rouge définie par Obama. Les grandes démocraties se sont alors retrouvées dos au mur : soit elles interviennent, soit elles se décrédibilisent et renoncent à leurs responsabilités mondiales. A l’instar de David Cameron et Barack Obama, du moins dans un premier temps, François Hollande a choisi d’assumer ses responsabilités et celles de la France et d’enfiler à nouveau le costume de chef des armées. Une fois n’est pas coutume, il faut s’en féliciter et l’en féliciter. Il n’est pas question ici de jouer les va-t-en guerre ou les gendarmes du monde. Il est question de principes moraux et de la vocation de la France.

« Notre pays a un rôle à jouer dans les affaires du monde »

Notre pays est une grande nation, patrie de Voltaire, Diderot, Robespierre, Bonaparte, Victor Hugo, Gambetta et de Gaulle. Ces noms qui claquent au vent et qui portent l’Histoire, si ce n’est le destin, de notre pays. Un combat passionné pour la liberté et la démocratie, un « cri qui résonne par delà nos frontières » chantait Ferrat. La France n’est pas intervenue en Irak pour les bonnes raisons, elle doit intervenir et faire cesser ce qu’il se passe en Syrie.

De nombreux pays dans le monde souhaitent ces frappes militaires mais peu ont le courage ou les moyens de les porter au cœur du Proche-Orient, arguant pour alléger le poids de leur honte que les conséquences de telles frappes sont imprévisibles . Il y a en somme deux types de pays : ceux qui se rendent et ceux qui se battent. La France, en Libye, au Mali, en Cote d’Ivoire, demain en Syrie a montré de quel côté elle se plaçait. Notre pays a un rôle à jouer dans les affaires du monde, il a la vocation et la responsabilité de promouvoir la paix et la démocratie, sans être focalisé sur les conséquences à court terme pour ses propres intérêts. Renoncer à cette intervention, c’est renoncer à l’Histoire de France, à sa vocation, à son destin de grande puissance, à sa soif de responsabilités mondiales. Renoncer à ces frappes serait pire que de les réaliser. Que vaudrait alors la parole de nos démocraties pour ceux qui nous testent et qui nous haïssent ? L’esprit munichois, selon le bon mot, une fois n’est pas coutume, d’Harlem Désir, ne doit pas triompher une fois encore.

Loin de moi cependant l’idée d’intervenir à chaque fois dans les affaires intérieures d’un pays ou bien même de porter le fer de la démocratie partout dans le monde, de Cuba à la Corée du Nord. C’est le devoir des peuples de porter ces aspirations, pas le nôtre. Mais ils doivent savoir qu’ils pourront trouver sur leur chemin la généreuse main tendue de la France.

Paul Godefrood