Tribune – Paul Godefrood, militant Les Républicains, appelle à s’interroger sur les ressorts profonds du vote Front national.

Image Superbenjamin / Licence CC

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Le premier tour des élections régionales s’est déroulé hier et a produit un résultat que beaucoup redoutaient sans lui donner beaucoup de crédit : une victoire écrasante du Front National, en position de l’emporter véritablement dans deux régions, et non pas dans six comme s’amuse à se faire peur la classe politique.

Plus désolant encore que ce score, qui n’est somme toute que l’expression démocratique d’un peuple, sont les réactions à chaud de la classe politique et d’une frange de la population, souvent la plus jeune, oscillant généralement entre la honte du pays, la culpabilisation et la stigmatisation de l’électorat frontiste ou encore l’incompréhension. Il serait intéressant de connaitre combien, parmi ces Cassandre se sont motivées pour aller exercer leur devoir citoyen. Avec un taux d’abstention de 49%, il semblerait étonnant que la totalité de ces commentateurs d’opérette ait une quelconque légitimité pour jeter l’opprobre contre ceux qui se sont effectivement déplacés aux urnes.

Plus désolant encore que ces réactions de vierges effarouchées, la réaction des leaders politiques. Les uns appellent les listes en troisième position à se retirer sous couvert de défense de la démocratie et de la République, déni absolu de démocratie car privant des millions de personnes d’un vote répondant à leurs convictions politiques et partant du principe éculé que les électeurs sont encore captifs des états-majors parisiens des partis. Les autres avouent comprendre le vote frontiste mais promettent encore et toujours de respecter cette fois-ci la parole donnée.

La poussée électorale du Front National est le fruit de nos renoncements, à droite comme à gauche. C’est le legs de quarante années de promesses non tenues, d’échecs systématiques sur la question de l’emploi, de la croissance, de la sécurité, de l’immigration, de l’identité. C’est le legs de la corruption des élus de partis traditionnels, qui, contrairement aux dires répétés de la classe politique dans son ensemble, n’est pas l’apanage du Front National, allant de G. Dallongeville au nord à J.N. Guerini au sud. C’est le legs de l’inconstance et l’inconsistance de la classe politique qui depuis 40 ans joue contre le peuple, offrant soit dit en passant au FN l’argument en or massif de l’opposition peuple–élite, en lui imposant toujours plus d‘Europe, d’immigration, de mondialisation, tout en taxant au choix de raciste ou de réactionnaire celui qui ne serait pas humaniste ou progressiste, entendre celui qui émet des doutes sur le bienfondé de ces politiques ou s’interroge sur la marginalisation d’une identité, d’un mode de vie ou de concepts aussi fondamentaux que ceux de nation ou de culture.

Le second tour sera ce qu’il sera. Nous ne pourrons pas échapper, je le crains, à une région au moins sous pavillon frontiste. Mais pour éviter de voir une nouvelle percée dans un an et demi, aux proportions et conséquences bien plus désastreuses, il convient de s’interroger sur les ressorts profonds de ce vote, qu’il est aujourd’hui injurieux de réduire à un vote contestataire ou inconscient.

Paul Godefrood