Depuis 1959, l’entreprise Mattel est le grand magnat du monde la poupée. On parle même plus souvent de « Barbie » que de « poupée ». En effet la conséquence du succès de Mattel est qu’aujourd’hui, tout le monde connaît la fameuse poupée blonde. Cependant, si Barbie a toujours fasciné et fait partie de l’univers ludique de nombreux enfants, elle a longtemps représenté la femme sous une apparence physique de perfection inatteignable, ce à quoi Mattel a décidé de remédier en créant de nouveaux physiques pour sa poupée star

Crédit photo : Flickr

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Barbie, modèle de vie ?

La réussite de Mattel est d’avoir su s’imposer en leader avec cette poupée Barbie. De plus, la marque a su atteindre les parents et leurs enfants. En effet, en 1986 Mattel lance la série collector « Barbie Holiday » avec la première poupée Barbie Blue Rhapsody et met ainsi sur le marché des poupées de collection dont les prix peuvent aller jusqu’à 100$. Mattel a également joué la carte de la diversité : en 1968 est créée Christie, l’amie noire de Barbie, et progressivement l’entreprise présente Barbie avec différentes professions : Barbie est libre, affranchie, Barbie est une femme active, et les publicités pour la poupée sont accompagnées de la phrase « We, Girls, can do anything. Right, Barbie? » (Nous, les filles, pouvons tout faire. Pas vrai Barbie ?). Bref, Barbie est une femme actuelle. Cependant, Mattel présente au travers de sa poupée une image de la femme très particulière. En effet, la femme doit être belle, mince et souriante. De fait, la poupée Barbie répond aux canons de beauté occidentaux : grande, élancée, visage fin et longs cheveux dorés. Certes, Barbie peut avoir plusieurs couleurs de peau, plusieurs professions et autant de tenues vestimentaires, mais Barbie garde le même corps et le même visage.

Crédit photo : 9gag

Les proportions de Barbie reportées sur une femme
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Une poupée peut-être une meilleure amie, un modèle et par conséquent un idéal physique. Celles qui se sont essayées à ressembler à la poupée Barbie sont bien loin du naturel de la jeune poupée plastique, et semblent même avoir perdu leur humanité, à l’image de l’Ukrainienne Valeria Lukyanova. En effet en réalité la poupée Barbie est complètement disproportionnée. Ses jambes sont bien trop longues, son visage trop fin, ses yeux trop grands.

Valeria LukyanovaCrédit photo : 9gag

Valeria Lukyanova
Crédit photo : 9gag

Face à ce modèle physique inhumain, il est possible de questionner l’éventuel rôle de modèle que la poupée pourrait avoir, alors qu’elle ne représente la femme que sous un seul trait. De fait, bien que les diverses gammes de poupées Barbie aient été mises sur le marché, son physique reste le même et elle ne peut être réellement customisée. Mais en janvier 2016, Mattel a décidé de renouveler l’image de sa célèbre poupée.

 

Le nouveau credo : avoir une Barbie qui nous ressemble vraiment 

En effet, Mattel a installé une grande diversité dans sa gamme Barbie. Dorénavant, Barbie peut non seulement changer de taille, mais peut aussi changer de poids. La poupée originale reste toujours en vente, mais elle est à présent accompagnée de nouvelles poupées plus réalistes, avec plus ou moins de formes, et plus ou moins grandes. Il est donc plus facile de trouver une poupée Barbie à travers laquelle il est possible de percevoir les différentes morphologies féminines, en oubliant toute exclusion que suggérait l’ancien modèle uniforme.

Capture d’écran de la page d’accueil du site Barbie.fr

Capture d’écran de la page d’accueil du site Barbie.fr

En représentant les femmes et la diversité de leurs apparences, Mattel prend le risque périlleux de remettre en question des idéaux de beauté qui commencent peu à peu à être perçus comme réellement extrêmes, voire dangereux. En témoignent le récent livre de l’ancienne mannequin Victoire Maçon Dauxerre, Jamais assez maigre, qui critique les dessous du monde de la mode, et les quelques défilés qui osent mettre en avant des femmes aux physiques différents des mannequins comme Ashley Graham. Est-ce une stratégie de Mattel qui se lance dans ce projet uniquement pour ne pas passer pour une entreprise bloquée sur un idéal physique qui commence peu à peu à se périmer et redorer son image sans réellement croire à la possible nouvelle identité de Barbie? Ou bien s’agit-il réellement d’une volonté de donner confiance à un plus grand nombre d’enfants qui jouent avec elle ? Les prochaines ventes nous diront si l’entreprise a réussi à conquérir un nouveau public avec ces jouets plus représentatifs.

 

Face au succès qu’a rencontré cette poupée après s’être imposée en gardant les mêmes traits physiques au fil des années, n’est-ce pas un peu périlleux de renverser les codes ? Évidemment. Mais Barbie doit être le reflet de la société contemporaine : elle doit tendre à la diversité et proposer un modèle atteignable. Barbie ne disparaît pas, elle grandit. Elle s’améliore et devient plus tolérante, en gardant son doux sourire et ses yeux de biche. L’évolution de Barbie s’annonce peut-être révolutionnaire.

 

Clotilde Vidal-Oustalet