On ne peut pas dire d’Arnaud Montebourg qu’il manque de volontarisme. Mais le bilan de l’action de son ministère, même s’il affirme avoir réussi à sauver près de 46 000 emplois depuis le 1er juin 2012, n’est pas fameux. Il y a eu notamment trois entreprises engagées dans une lutte contre une fermeture.

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Arnaud Montebourg, le ministre du redressement productif

Les prévisions de croissance ont de quoi inquiéter les salariés. Souvenez-vous, lors de ses différentes interventions en décembre dernier, François Hollande avait promis une « inversion » de la courbe du chômage d’ici à la fin de l’année. Malgré la mise en place de contrats de génération et d’emplois d’avenir, la promesse semble intenable. Et pour cause : économistes, Commission européenne, tous s’accordent pour prévoitir une croissance nulle pour la France en 2013. A cela s’ajoutent les mauvais chiffres du chômage. L’INSEE dénombre 2 900 000 chômeurs au sens du Bureau International du Travail à fin 2012. Le taux de chômage est porté à 10,6 %. Le nombre de chômeurs a augmenté d’environ 150 000 en six mois.

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Et vu les prévisions d’activités, on se demande s’il va se tasser. Les défaillances d’entreprises et les plans sociaux vont très probablement continuer d’affluer. Qui n’a pas entendu parler de ces entreprises qui ouvrent la Une des JT : Continental, PSA, Arcelor-Mittal, Goodyear, Sanofi, Petroplus, etc. ? Chacune de ces entreprises a son lutteur emblématique. Edouard Martin est l’un d’eux. Le leader CFDT du site Arcelor-Mittal de Florange avait reçu Arnaud Montebourg en septembre dernier. Le ministre du redressement productif venait présenter aux métalos les scénarios. Parmi ceux-ci, la piste de la nationalisation. Mais le premier ministre l’écartera, préférant signer un accord avec Mittal, dans lequel ce dernier s’engage à des investissements. L’industriel indien ne respectera pas ses engagements. L’accord était, de toute façon, déséquilibré selon les salariés. Montebourg aurait alors voulu démissionner, après ce nouvel échec.

Il y avait eu le précédent Peugeot. Le constructeur automobiliste avait rendu public en juillet dernier son intention de fermer le site d’Aulnay-sous-Bois, localisé en banlieue parisienne. 8 000 postes seront supprimés sur toute la France. A l’annonce de la nouvelle, Montebourg s’en était pris à la stratégie puis aux actionnaires. François Hollande lui-même avait dit que le plan n’était pas acceptable en l’état. Finalement, le plan de restructuration devrait être soumis à l’approbation des salariés dans les prochains mois. Il a été accepté en février par presque tous les syndicats majoritaires, excepté la CGT. D’ailleurs Jean-Pierre Mercier qualifiait le plan « d’accord de la honte » entre le gouvernement et les dirigeants de PSA.

Aussi emblématique, l’affaire Goodyear. En janvier, la fermeture est annoncée du site d’Amiens. Plus de 1100 postes vont être supprimés. Le gouvernement lance la piste de la reprise par Titan. Mais, le groupe américain se retire. Son PDG, M. Taylor, écrit une lettre virulante. Il y explique en substance que les « soi disant ouvriers » ne travaillent que « trois heures par jour »… Le ministre dénoncera des propos « extrémistes » et « insultants », menaçant d’exercer des contrôles douaniers sur les produits que Titan importerait en France. Certes, cette lettre ne mentionne pas le fait que la réduction de l’activité y est pour quelque chose. Mais elle fait état de l’exaspération d’un homme d’affaires qui doit affronter les « barjots du syndicat communiste ». C’est ainsi qu’il qualifie dans une nouvelle lettre les syndicats. Cela fait cinq ans que Goodyear essaye de restructurer l’usine mais la CGT a toujours refusé la négociation. Une partie du personnel est opposée à la stratégie du syndicat. L’autre usine de pneus de la ville a accepté de remettre à plat son organisation pour sauver une partie des emplois. Faut-il accepter un plan social ou sauver coûte que coûte chaque emploi et chaque avantage au risque de voir son entreprise fermer ? Un dilemme qui coûtera de toute façon aux salariés les plus proches de la retraites, et aux moins qualifiés.

Ces entreprises ont fait la Une des journaux, mais ils ne sont que quelques arbres qui cache une dense forêt. Selon les chiffres données par le ministère du redressement productif, plus de 1 900 dossiers d’entreprises en difficulté sont en instance. Ils doivent passer devant les tribunaux de commerce qui décident du sort des entreprises. Ces tribunaux, composés de commerçants, étaient dans le viseur d’Arnaud Montebourg. Alors député, il critiquait leur manque d’indépendance dans un rapport de 800 pages, en 1998. Mais pour l’heure, cette question ne semble pas évoquée, et on déconseillerait même au ministre de la médiatiser. Une réforme de la juridiction consulaire devrait se faire conjointement avec le ministère de la justice.

Entrepreneurs, salariés, chômeurs, ils ont tous écouté François Hollande ce 31 décembre 2012. Et ils attendront avec impatience le 31 décembre 2013 pour découvrir les chiffres du chômage et les résultats de la croissance. Ils remercieront la gauche à l’occasion des élections municipales de 2014.

Marvin Nsombi