Entre des élections capitales et des référendums aux résultats parfois inattendus, 2016 a été une année régie par l’incertitude. Si le CAC40 s’est révélé malgré tout stable, le cours des devises a notamment été plus mouvementé. Des événements économiques cruciaux ont eu lieu tout au long de cette année. Alors que 2016 touche à sa fin, c’est le moment de faire une rétrospective de quelques-uns de ces temps forts de l’économie.

 

En avril, une enquête sans précédent sur l’évasion fiscale : les Panama papers 

Il s’agit d’une des plus grandes révélations d’évasion fiscale : une fuite de 11,5 millions de documents révélant l’utilisation frauduleuse de comptes Offshore par des centaines d’anonymes et de personnalités. Ces sociétés, appelées sociétés-écran, étaient de simples coquilles, sans réalité économique, et permettaient aux individus de déplacer une partie de leur fortune dans des paradis fiscaux (notamment le Panama). Cette opération financière était un moyen de diminuer le montant de leurs impôts dans leur pays de résidence. Français Hollande, qui annonçait lors de sa campagne que son ennemi était la finance, s’est réjoui initialement de cette fuite. Il a notamment remercié les lanceurs d’alertes qui allaient permettre à la France de « faire encore des rentrées fiscales de la part de ceux qui ont fraudé ». D’ailleurs, ces révélations ont fait revenir certains exilés fiscaux dans leur pays, par peur d’être sur une éventuelle prochaine liste. En outre, de nombreux pays ont mené des enquêtes sur l’évasion fiscale nationale.

Plus que simplement révéler l’identité des bénéficiaires de ces sociétés-écran, cette fuite a permis de mettre en exergue l’opacité du système financier et de l’optimisation fiscale. Le 8 mars 2016, les Etats du 20 ont conclu un accord qui vise à l’échange d’informations sur les déclarations nationales de chaque entreprise multinationale. Plus d’une cinquantaine de pays entreront dans ce système d’échange dès 2017. Il y a une volonté affichée d’aller vers plus de transparence.

Mossack Fonseca, cabinet d'avocats au Panama, mis en cause dans le scandale des Panama Papers pour blanchiment d'argent et fraude fiscale - Wikimedia Commons by Valenciano (CC)

Mossack Fonseca, cabinet d’avocats au Panama, mis en cause dans le scandale des Panama Papers pour blanchiment d’argent et fraude fiscale – Wikimedia Commons by Valenciano (CC)

Lien vers la vidéo de Cyrius North qui explique plus en détail l’affaire des Panama Papers dans l’un de ses formats phares, le « Cyrusly » : https://www.youtube.com/watch?v=mOIcyzaIBZE

 

« Keep calm and leave Europe » : le Brexit

Le 23 juin, les Britanniques ont voté à 51,9% des voix la sortie du Royaume-Unis de l’Union Européenne. Il s’ensuit un effondrement financier avec une chute importante -d’environ 7%- des Bourses de Londres, Paris et Franckfort. Ceci est dû à une forte incertitude (Comment va faire l’Union Européenne privée de l’une des plus grandes puissances mondiales ?) que les marchés financiers évitent et fuient au maximum. Le lendemain du référendum, la livre a perdu 11% de sa valeur et par ricochet, l’euro a perdu 3% face au dollar, souffrant encore de l’incertitude que la décision des Britanniques a engendrée.

Par ailleurs, la Grande-Bretagne est souvent considérée comme une porte sur l’Europe par de grandes entreprises étrangères ; le Brexit va donc entrainer une perte d’attractivité du pays. Certaines firmes ont assuré qu’elles relocaliseraient leur siège au vu du résultat : JPMorgan a notamment déclaré qu’elle déplacerait quelques milliers d’emploi hors de la Grande-Bretagne.

En outre, quitter l’Union Européenne, c’est aussi quitter le marché unique. Or la Grande-Bretagne réalise presque la moitié de ses exportations au sein de l’Union Européenne. Le Royaume-Uni pourrait alors faire face à des barrières tarifaires, qui ferait souffrir ses exportations, alors que sa balance commerciale est déjà déficitaire.

Toutefois, de par l’article 50, la Grande Bretagne restera dans l’Union Européenne encore au moins 2 ans, durant lesquels il y aura des négociations entre les pays de l’Union pour trouver un accord sur les modalités de la sortie de la Grande Bretagne. Le temps pour l’Ecosse, qui était majoritairement en faveur du Bremain, d’organiser un nouveau référendum pour rester dans l’Union Européenne ?

 

Manifestation pour le Bremain à Londres - by Jwslubbock : Wikimedia Common

Manifestation pour le Bremain à Londres – by Jwslubbock : Wikimedia Commons licence CC

 

La crise de la Deutsche Bank

La Deutsche Bank est classée parmi les plus grandes banques d’investissement du monde. Elle est présente dans plus de 70 pays à travers le monde. Néanmoins, 2016 n’a pas été un bon cru pour la grande banque allemande qui a dû faire face à l’affaire de la crise des subprimes. Elle est en effet accusée d’avoir vendu des titres toxiques, les subprimes, avant l’éclatement de la crise, grâce au mécanisme de titrisation, et d’avoir ainsi induit en erreur des investisseurs. La Deutsche Bank est sanctionnée en septembre d’une amende de 14 milliards de dollar par la justice américaine. Cette menace a engendré une crise de confiance des investisseurs, et de ce fait une chute drastique du cours de la Deutsche Bank.

Initialement, la Deutsche Bank refuse de payer, et affirme que « les négociations ne font que commencer ». Toutefois, certaines banques américaines, comme JPMorgan et la Bank of America avaient déjà cédé et déboursé plusieurs milliards de dollars.

Le 22 décembre, un accord est enfin trouvé avec la justice américaine : la Deutsche Bank a négocié une réduction du montant de l’amende à 7 milliards de dollar, dont une partie sera reversée aux victimes de la crise. La division par deux de l’amende amoindrit le risque de faillite pour la Deutsche Bank qui assure en outre que cette dépense « n’aura pas d’influence substantielle » sur son bilan de l’année 2016 : ceci a revigoré la confiance des investisseurs, d’où une remontée des actions en bourse de la Deutsche Bank. Néanmoins, cette dernière reste impliquée dans de nombreux litiges : la banque a dû faire face à des frais juridiques qui s’élevaient à 12,7 milliards d’euros cette année, ce qui n’inspire pas la plus grande confiance pour les investisseurs.

Siège social de la Deutsche Bank à Francfort - by Raimond Spekking : Wikimedia Commons

Siège social de la Deutsche Bank à Francfort – by Raimond Spekking : Wikimedia Commons licence CC

 

La loi travail déchaîne les foules

Le jeudi 15 septembre, les syndicats français avaient organisé une ultime mobilisation contre la loi Travail, entrée en vigueur un mois plus tôt, notamment du fait du recours au 49-3 par Manuel Valls. Qu’est-ce qui va changer pour les travailleurs et les entreprises en 2017 ?

L’objectif de la loi El Khomri était d’offrir plus  de souplesse aux entreprises, notamment quant au temps de travail. Si une entreprise fait face à des commandes exceptionnelles et a alors besoin de plus de main-d’œuvre, l’employeur peut demander à ses employés de travailler jusqu’à 60h, soit 12h de plus 48h hebdomadaires maximum dans la législation. Toutefois, le recours à cette mesure doit rester exceptionnel.

La question du licenciement économique a également soulevé la foule. Le texte vise à rendre moins compliqué ce licenciement, en cas de cessation d’activité de l’entreprise ou de réorganisation de l’entreprise en vue de la sauvegarde de sa compétitivité. L’effet attendu est de favoriser l’embauche, notamment en CDI, qui fait parfois peur aux petites et moyennes entreprises. Favoriser le licenciement économique a également pour objectif de protéger les salariés, en évitant que ces derniers soient contraints d’accepter une rupture conventionnelle de contrats, et soient donc moins protégés après la perte de leur emploi.

En outre, la loi vise à simplifier la législation française du travail, dont la complexité est largement critiquée : les branches sont donc en  voie de redynamisation, et leur nombre devraient passer de 750 à 400, pour aller progressivement vers l’objectif de 200 branches en 2019.

Manifestation contre la loi Travail le 9 mars 2016 à Marseille - by Superbenjamin Wikimedia Commons, licence CC

Manifestation contre la loi Travail le 9 mars 2016 à Marseille – by Superbenjamin Wikimedia Commons, licence CC

Les salariés auront par ailleurs le droit à la déconnexion : les employeurs ne pourront plus reprocher à leurs salariés le fait qu’ils soient injoignables en dehors de leur temps de travail.

L’objectif final est d’améliorer la compétitivité des entreprises françaises, et, malgré ce que les opposants à cette loi ont décrié, de protéger les salariés, du moins sur le papier.

 

Quelques chiffres pour clôturer 2016 

Bonne nouvelle pour François Hollande, les chiffres du chômage étaient en baisse à la fin novembre 2016 pour le troisième mois consécutif. Le nombre de demandeurs d’emplois de la catégorie A, c’est-à-dire ceux inscrits à Pôle emploi, sans emploi et tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi, a diminué de 0,9% par rapport au mois d’octobre. Sur l’année 2016, il y aurait eu une baisse de 3,4% du nombre de chômeur, ce qui représente 122600 personne. C’est l’un des meilleurs résultats depuis la crise selon le Ministère du travail. Néanmoins, cela ne veut pas dire que ces 122600 personnes ont trouvé un emploi : elles peuvent ne plus être inscrites à Pôle Emploi ou avoir changé de catégorie. Or, sur l’année 2016, il y a eu une hausse de 0,3% du nombre de chômeurs inscrits –toutes catégories confondues.

Au troisième trimestre 2016, le produit intérieur brut (PIB) en volume est en augmentation : +0,2 %, après −0,1 % au deuxième trimestre, tandis que la dette publique française en baisse de 0,9 point au troisième trimestre, s’élevant ainsi à 2160,4 milliards d’euros.

L’année 2016 se conclue d’autre part sur une forte hausse du prix du pétrole. En effet, les membres de l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole) se sont mis d’accord pour limiter la production d’hydrocarbures à environ 33 millions de barils par jour. Cette année aura donc été très instable pour le marché des hydrocarbures, dans la mesure où le prix du baril avait baissé de 20% au premier semestre, atteignant des tarifs exceptionnellement bas.

 

En vous souhaitant une belle année 2017,

Mathilde PIRIOU-GUILLAUME