Le Musée National d’Art Moderne du Centre Pompidou de Paris propose actuellement une exposition originale sur l’art contemporain des trente dernières années. Riche de 450 œuvres mêlant peintures, sculptures, installations, vidéos, films, dessins, photographie, architecture et design, cette exposition offre un panorama de diverses œuvres d’art face aux transformations de la société. Regards croisés sur l’art et les mutations du monde moderne depuis les années 80.

Exposition Une histoire : Art, Architecture, Design des années 1980 à nos jours au Centre Pompidou de Paris ( © C.B. / ParlonsInfo)

Exposition Une histoire : Art, Architecture, Design des années 1980 à nos jours au Centre Pompidou de Paris ( © C.B. / ParlonsInfo)

L’exposition est née de la volonté de comprendre les mutations de l’art moderne depuis les années 1980. De la mondialisation, en passant par les conflits, les nouvelles technologies, la question de l’identité ou encore du corps et de l’intimité, le parcours confronte la vision d’artistes du monde entier. C’est notamment à partir de l’année 1989 que la diversité des productions artistiques prend racine, année charnière face à la chute du Mur de Berlin. S’ensuivra de grands événements collectifs, riches de conséquences sur la société moderne, tels que la Guerre du Golf de 1991, le 11 septembre mais encore  la crise financière de 2008. La “révolution culturelle” explique les mutations de l’art contemporain notamment avec le développement de la culture de masse, du tourisme culturel, des nouvelles formes de consommation de l’art ainsi que de la place prise par le marketing. Cette exposition apporte un reflet éclectique face à une certaine vision du monde moderne.

 

L’artiste comme historien

Les artistes contemporains du XXe siècle ont montré une certaine volonté d’utiliser l’art pour témoigner des événements et des conflits du monde moderne. La tendance d’un art de critique ou du « protest art » n’a fait qu’amplifier depuis la chute du mur de Berlin en 1989. De nombreux artistes se penchent sur des documents historiques et entreprennent des recherches d’archives pour mettre en forme leurs œuvres. L’art contemporain de ces dernières décennies se penche ainsi sur le passé à travers l’excavation et la nostalgie. Au début des années 1990, des artistes afro-américains reviennent sur leurs histoire dans la lignée de Jean-Michel Basquiat. Cette génération est notamment marquée par l’entrée sur la scène internationale d’artistes du Moyen-Orient comme  Rene Green et Glenn Ligon. A travers de nouvelles pratiques artistiques, ils se confrontent à travers l’histoire de leurs régions. A l’ère postcommuniste se révélent alors des artistes tels que Edi Hila ou Mladen Stilinovic et qui ont eu un impact fort sur les générations précédentes comme celles d’Anri Sala ou de David Maljokvic.

 

L’art au corps

Les années 1990 sont marquées par le retour des pratiques performatives centrées sur le corps. Oleg Kulik a ainsi défrayé la chronique avec ses performances où il se présentait nu, en chien tenu en laisse, mettant en valeur l’animalité de l’homme. Le corps meurtri ou blessé est pour beaucoup un thème essentiel. Sophie Ristelhueber réalise ainsi en 1994, Every One, série de photographies de corps suturés. Les réflexions sur le genre sont aussi importantes dans la production artistique. En 2012, Nicholas Hlobo trouble la notion d’identité sexuel avec son œuvre Balindile, sculpture en morceaux de pneus couturés, évoquant un possible “intersexe”.  Sarah Lucas elle, réalise des sculptures difformes, corps sans organes sexuels, qui brouillent la frontière avec les genres.

 

L’artiste comme documentariste : au plus près du réel

La pratique documentaire devient importante à partir des années 1990, née suite à  l’apparition de la photographie et du film puis de la vidéo. L’artiste devient alors témoin et commentateur du réel. L’apparition d’Internet influence les artistes notamment à travers les conflits armés, les crises, les nouvelles réalités socioéconomiques, l’évolution des mœurs. Dans Seventy in seven, Allan Sekula documente en 1993 le monde du travail en Corée du Sud. Amar Kanwar, dans The scene of crime (2011), montre la transformation des paysages indiens sous la pression des grands groupes miniers.

 

Architecture et design des années 80 : nouvelles tendances

Le style des années 1990 reste encore très présent, de même que le nom des principaux créateurs de cette période. S’affirme alors le retour d’un certain modernisme , un minimalisme où le métal, noir ou chromé est devenu la norme d’un suspens de l’histoire.
La création française semble répondre aux exigences du high tech anglais de Philippe Starck à Jean Nouvel, de Martin Szekely à Sylvain Dubuisson jusqu’aux intérieurs de l’Élysée revue par Ronald Cecil Sportes avec Norman Foster, ou encore les créations technoïdes de Ron Arad. Le nouveau minimalisme incarné au Japon par les créations de Koichiro Kuramata, la Light Architecture d’Itsuko Hasegawa ou encore Toyo Ito affirme une nouvelle forme d’individualisme analysée en 1983 par Gilles Lipovetsky dans son essai l’Ère du vide.

 

Design connecté au vivant

Face au développement de la société de consommation, certains designers explorent de nouvelles façons d’approcher leur discipline.  Le design “Slow” prône le retour à la lenteur, à la nature. Les nouvelles technologies prennent une place importante dans la société et bouleversent les processus de conception, de fabrication et de production. Les créateurs tentent ainsi de repenser le design : plus proche du monde du vivant que de la société industrielle.

 

Exposition Une histoire : Art, Architecture, Design des années 1980 à nos jours jusqu’au 7 mars 2016 au Centre Pompidou de Paris.

 

Camille Bour